Biographie - Ma vie de coureur

J’ai commencé à courir par la faute d’une circulaire scolaire. Alors que j’avais 13 ans, ayant reçu à faire signer une circulaire pour des activités à option dans le cadre de l’école, mon père m’a demandé si je ne voulais pas m’inscrire et je n’ai pas osé dire non. Rapidement, j’ai commencé à apprécier et me suis rendu compte que j’arrivais à battre mes camarades sur des distances plus longues que 1 ou 2 kilomètres. Nous avons fait un test sur une heure et j’ai réussi à courir 15.330 km à 15 ans.

L’hiver, je faisais du ski de fond de compétition avec mon père et mes frères. L’été, je faisais des courses de montagne. En Suisse, dans les années 70 à 80, on en trouvait à profusion. C’est ainsi que j’ai fait le Championnat International des courses de Montagne Européenne (CIME) 3 fois en junior. Je l’ai remporté lors de ma dernière année junior en 1978, en allant courir en France, Italie, Autriche et en Suisse. En junior, j’ai vu que je battais assez facilement mes camarades sur les longues distances alors que sur une heure de course, c’était plus dur. (2x 1er à Sierre-Zinal, 3x à Chaumont-Chasseral-Chaumont, Monte-Faudo, Verrès Col Tsecore, etc…) Je me suis donc gentiment tourné sur le marathon en arrivant dans la catégorie élite.

Je passais déjà pour un coureur qui aime le long et qui s’y classe bien. Après 2 bonnes saisons en élite, j’ai commencé à souffrir des genoux, spécialement du genou droit. En 1981, je me suis fait opérer à 21 ans et demi d’une ostéotomie de valgisation. (Ils m’ont coupé une rondelle plus large d’un côté au haut du tibia pour le redresser et ainsi équilibrer l’articulation). A la suite de l’opération, une veine a été trop comprimée et un muscle s’est nécrosé qu’ils ont dû enlever six mois plus tard pour éviter une gangrène. Depuis ce jour et malgré 2 séances de physio par semaine durant 2 ans, je n’arrive plus à relever le pied. A la suite de ça, j’avais une prothèse à glisser dans la chaussure pour m’aider à ne pas m’encoubler car mon pied pendait. Petit à petit, j’ai appris à marcher en levant plus haut la jambe pour que le pied ne se croche pas partout. Je boîte donc toujours. Pour courir, je pose d’abord la pointe du pied et ensuite seulement le talon.

En 1986, 5 ans après cette opération, j’ai retrouvé un bon niveau de course sur les longues distances. J’ai réussi à avoir le record de mon canton au marathon en 1987 en 2h31 et d’avoir terminé 3ème de l’ascension du Mont-Cameroun, au Cameroun. La même année, j’ai commencé à souffrir des hanches. J’étais invité à courir en janvier 1988 l’ascension du Mont-Cameroun. Ma profession était garde-forestier. Alors que je travaillais en forêt, je me suis cassé 2 apophyses des vertèbres lombaires. Au lieu de courir au Cameroun, j’étais allongé dans un lit d’hôpital, mais ils m’ont invité pour la course de janvier 1989.
En 1988, je me suis préparé pour un 100 km et j’arrivais facilement à courir 2 jours de suite 30 km à 15 km à l’heure, sans être trop fatigué. J’espérais viser les 7 heures. Une semaine avant ma course, j’ai attrapé une intoxication alimentaire lors de l'anniversaire des 50 ans d'une personne de mon entourage et j’étais malade avec de la fièvre toute la semaine. Impossible de courir alors que je savais que je devais arrêter la course et changer de métier. Les médecins avaient diagnostiqués de l’arthrose à la hanche gauche, dégénérescence de l’os, il avait comme fondu et était replié comme une bougie qui est trop près d’une source de chaleur. J’étais démoralisé, je ne courais plus, puis je réessayais, j’avais de nouveau mal, j’arrêtais de nouveau et ainsi, après ma dernière course au Cameroun en janvier 1989 où j’étais invité, j’ai arrêté de m’entraîner et de faire des compétitions. Mon orthopédiste m’a conseillé d’éviter de boire du café, du thé noir, du coca et d’éviter l’alcool, car trop acide et mauvais pour l’arthrose. Parallèlement à cela, il m’a prescrit des gouttes d’oligo-éléments matin et soir.
Les douleurs ont progressivement diminué avec les années durant lesquels j’ai construit ma maison et refait une formation professionnelle comme employé de commerce. Ma vie avait donc complètement changé. Au lieu de parcourir les forêts et d’y travailler et d’y retourner le soir pour m’entraîner, je faisais beaucoup moins d’effort physique. Pour compenser, car je ne tenais pas en place, j’ai fait plus de vélo que j’avais toujours un peu pratiqué. Après 7 ans d’arrêt de course, je n’avais plus mal. En 1996, le 1er Défi du Val-de-Travers - course à pied de 72 km avec 2’800m de dénivellation passait devant chez moi. J’aidais pour le ravitaillement. De voir ces coureurs essayer une distance pareille m’a tout de suite plu. Je me suis dit que c’était pour moi. Il fallait que je voie si j’avais encore mal si je recourrais. Une année plus tard, j’étais au départ de la 2ème édition et finissais déjà à un honorable 11ème rang. 8 ans d’arrêt et de nouveau parmi les meilleurs sur les longues distances avec 1 année d’entraînement mixte vélo-course pour ménager mes articulations.

Depuis, je ne souffre plus de ma hanche gauche, malgré 10 courses de 24 heures (record à 248.965 km), 9 courses de 100 km (Record à 7h38, Bienne 7h39), plusieurs trails comme le Grand-Raid de la Réunion (14ème général, 3ème V1), la Trans-Oasis (126km en 6 jours désert tunisien) 2 marathons des sables (24ème en 2006), 3 Ultra Trail du Tour du Mont-Blanc (8ème en 2004, 2ème V1), 4 Genève-Basel Swiss Jura Marathon de 7 jours – 350km (3ème en 2004, 5ème en 2006) , une trentaine de courses d’ultras en trail ou sur route de 43 à 128 km(en 2010 : TransGranCanaria, Verbier-St-Bernard, l’Ultra Tour du Beaufortain), 3 Spartathlon de 246 km (7ème en 2003), la Nove Colli 2005 de 202,5 Km, 8 Défi du Val-de-Travers, 2 courses de 6h, 3 courses de 12 h, 2 courses de 48 h avec record Suisse à 359.970 km, 1 course de 6 jours avec record suisse à 842.254 km, la Transalpine Lauf de 8 jours, la Badwater 2007 (6ème en 28h29.07) et la TransEurope de Bari au Cap Nord sur 4500 km en 64 jours sans jours de repos…etc…en plus de nombreuses petites courses allant de 7 km au marathon. Sur des toutes longues distances, je me classe régulièrement parmi les premiers de ma catégorie et du général également. (Etat au 31 août 2010)

Le kilométrage annuel est passé progressivement de 4700 km à plus de 10'000 km en 2009. (grâce à la TransEurope et une grosse préparation) Ma meilleure saison en 2004: presque chaque course m’a vu monter sur un podium, soit au général, soit dans ma catégorie. Pourtant, j’ai connu quelques blessures comme tout sportif. Parfois, je souffre du nerf sciatique qui se coince et me fait mal dans la cuisse droite, même si cela ne m’a pas empêché de faire de bons résultats. Les genoux sont mon point faible actuellement.

Je suis né le 24 novembre 1959. Remarié en 2010 avec Julia Alter, excellente coureuse d’ultra, médaillée de bronze aux Championnats du monde des 24h à Brive en mai 2010 avec un record à 230,250 km, nous nous entrainons ensemble depuis 2007. Mes 3 enfants vivent avec nous, Grégoire né le 1er février 1988, Florian né le 19 novembre 1989 et Lauriane née le 26 octobre 1992. Ils font leur sport et ils viennent parfois courir avec moi. Je m’entraîne donc beaucoup et pourtant je travaille à 1h30 de mon domicile en train. Je passe 3 heures par jour en transport. Je cours donc à midi au lieu de manger et je retourne le soir 2 à 3 fois par semaine. Le week-end, je cours de 40 à 120 km à l’entraînement, mais généralement entre 60 et 80 km.
Je suis un vrai passionné et la course me le rend bien, je suis content et estime avoir beaucoup de chance de pouvoir recourir. Je savoure cette nouvelle possibilité et je pense que c’est la raison principale de ma grande motivation qui étonne beaucoup de monde. Une autre motivation vient aussi du fait que j’ai une tronche à relever des défis. Alors junior, j’ai entendu quelqu’un me dire que je ne serais jamais un grand coureur. Je ne serai jamais champion olympique mais mes résultats sur 100 km ou plus sont loin d’être à la portée de tout le monde et je ne crois pas être ridicule. La course à pied m’a offert aussi beaucoup d’amis de pays et d’horizons divers et c’est aussi une motivation que de continuer à courir pour les voir ou connaître de nouveaux amis. Mes résultats et le nombre de grande course que j’arrive à effectuer chaque année sont le fruit de ce gros volume d’entraînement, mon corps est habitué à devoir récupérer rapidement. Une semaine avant une grosse compétition, je trottine en général 2 fois seulement.
Pour compliquer le tout, j’ai la glande thyroïdienne qui est atrophiée et ne fonctionne plus. Cela me fatigue parfois davantage mais n’a pas raison de ma volonté. J’espère courir aussi longtemps que je le pourrai car plusieurs courses connues me font envie. De naturel optimiste, bûcheur plutôt que doué, je compte bien garder la santé et la volonté pour être dans les pelotons dans 10 ans en restant dans les bons coureurs !



Noiraigue, le 13.09.05, réactualisé le 9 septembre 2010 Christian Fatton