Athènes-Spartes (Poème de 246 km de course)

<< Retour à la liste des poèmes >>

Me raisonner à traîner
Doux, douze kilomètres à l'heure
Vrai, au début c'est du beurre
Me mettre à calculer
A ce rythme je suis vainqueur !

Me garder cette cadence
C'est tenter ma seule chance
Aux meilleurs en confiance
Me mettre à spéculer
Le podium inavoué !

Me régler en métronome
Désireux d'oublier l'homme
Qui du doute à ma foi slalome
Lorsque quelques pas je claudique
Lorsque l'effort va, domestique.

Je vais me confiant aux étoiles
Par petits pas sondant ma moëlle
Me vois à travers bien limpide
M'abandonne à ma course, mon guide
Enivré d'osmose, mais lucide !

Par étape, je me ravitaille
Miel banane et coca m'étaye
Donné par ces bambins qu'égayent
La nuit blanche, la course et ses ouailles
Requinqué d'émotions je tressaille !

Au sommet des chants m'accueillent
Ils m'éclairent plus que la lune
Me mettent le coeur dans un fauteuil
Et apaisent mon infortune
Mon genou foulé s'endeuille.

Le rêve en cauchemar vacille
C'est un coup de poing à l'orgueil
Finie la gambade du chevreuil
L'allure s'estompe sur bris de châssis
L'autre jambe poursuit d'acrobatie !

Ô genou où douleur bastonne
Je n'aime pas ce que tu mitonnes
200 kils pour rien que t'élimines
Comment faire pour qu'au moins je clopine
Chaque pas s'arrache non sans rogne !

Une course contre la montre commence
20 heures durant troisième forçat
J'en appelle à la providence
En misérable galapiat
Redoute l'arrêt comme sentence !

Mon avance fond dans la torture
Corps et âme rêvent de sparadrap
Je m'insulte à penser rupture
Pourtant au matin elle est là
Mon genou, Judas du dégât !

La jambe deux longs mois en congé
S'impatiente de pugnacité
L'an prochain je vaincrai la caillasse
A Spartes je sifflerai comme un geai
Baisant la statue Léonidas
Le champagne se boira par harasse !

 

Christian Fatton
Noiraigue, le 23 janvier 2003



<< Retour à la liste des poèmes >>