Le croissant du Creux-du-Van

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La nappe du soir se tintait déjà de noir,
je cachais, sous le bras, ma truite braconnée,
caché des regards, marchant et prêt à déchoir.
Je salivais à la promesse de bien souper
quand je vis, grand comm'mil croissants de boulanger
un croissant, bonne pâte, sortir du Creux-du-Van,
ses deux pointes en bas, sa croûte marbrée de blanc.

Pâle comme une veilleuse, clairant le firmament,
se cherchait-il vers les étoiles quelques parents ?
Je levai les bras mais il était translucide,
la sombre crête l'expectant de son isoloir,
il grandissait à ne plus faire qu'un rond candide.
De son four le Creux-du-Van, se surseoir
de croissant en miche, m'en tombent les bras, stupide.

Grand rond blanc sur un tableau noir, l'entière lune,
"la Grande Ourse - sa casserole en écritoire",
me la désigna, pour ma truite l'y recevoir.
Sans croissant, je mangeai mon poisson sans rancune,
la rivière giboyeuse calmant mon infortune,
m'enclint de braconner bien davantage,
la faim me tenaillant, me vouant aux mirages.


Christian Fatton selon idée de Florian
Noiraigue, le 28 mars 2001



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